Sur la plage, un couple vous demande de surveiller leurs affaires pendant qu’ils vont se baigner. D’ordinaire aimable et enclin à rendre service, vous auriez sans doute accepté de bon gré.
Mais les participants jouent le jeu et imaginent une réaction à l’opposé de leur instinct !
Photo : Sergio Souza
Sur la plage… (Alain)
Hier soir Pénélope a rompu. Depuis quelque temps j’étais sans ressources, elle m’hébergeait. Je me suis donc retrouvé à la rue avec ma vieille AX et quelques sous en poche.
Je me suis dirigé vers les Sables d’Olonne pour essayer de me refaire au Casino des Pins. Vers 03H00 du matin, je me suis retrouvé « lessivé » aussi bien sur le plan moral que financier. Mes poches étaient vides.
Par cette chaude nuit d’été j’ai essayé de dormir dans ma voiture. Finalement en début de matinée, j’ai décidé d’aller m’allonger sur la plage.
J’ai récupéré la vieille serviette de bain, servant de plaid, pour protéger les sièges arrière de ma Citroën. Vêtu d’un simple T-shirt, d’un short et d’un bob, je suis allé m’étendre sur la plage tout proche.
J’avais trouvé un coin isolé et profitait du calme de l’endroit. En fin de matinée, un jeune couple est venu s’installer à une dizaine de mètres de moi. J’ai tout de suite remarqué leurs légers vêtements de « marques ».
Une demi-heure après leur arrivée, la jeune femme s’est dirigée vers moi. Elle s’est tout d’abord excusée de me déranger. « Nous souhaitons aller piquer une tête. Pourriez-vous de temps en temps jeter un coup d’œil sur nos affaires ?».
Sans retirer mes larges lunettes de soleil, j’ai marmonné : « Oui, pas de problème ». La marée était basse, pour avoir assez d’eau, pour leur bain, ils ont dû faire au moins deux cents mètres.
J’ai jeté, de très près, un coup d’œil à leurs effets. Dans le sac de la dame, il y avait un e-phone récent et un portefeuille. Je n’ai pu résister à la tentation, j’ai ouvert celui-ci.
En plus des pièces d’identité et d’une carte, dite de crédit, il y avait cinq billets de vingt euros. J’ai fait main basse sur ceux-ci. Avant de partir j’ai gravé dans le sable « Désolé Merci ».
J’ai eu très peur quand mon véhicule dans un premier temp a refusé de démarrer. Puis j’ai filé vers le sud sans demander mon reste.
(Brigitte)
Sur la plage, un couple me demande de garder leurs affaires le temps de leur baignade.
D’instinct j’aurais tendance à dire : oui avec plaisir !!!
Pourtant je m’entends répondre que je vais moi-même très bientôt quitter ce lieu pour ne pas avoir la responsabilité d’une situation qui pourrait mal tourner, du style ne pas les voir revenir ou bien aussi être accusée d’avoir dérobé un objet dont l’existence m’était inconnue à l’avance.
Pourquoi donc ces idées négatives ?
Disons qu’il m’est arrivé une mésaventure un peu identique alors que j’avais une totale confiance dans les patrons de la pizzeria qui m’avaient embauchée pour la saison : lors d’une fin de soirée bien arrosée par un couple de leurs amis, ils m’ont demandé de mettre l’addition des boissons à leur compte, puis une fois les clients « amis » partis, m’ont reproché d’avoir fait une erreur dans l’addition et ont voulu me soustraire cet argent de mon salaire. J’en fus révoltée et quittai sur le champ cet environnement malsain !!!
Du coup je quittai la plage avant le retour de mes voisins pour ne pas passer pour une menteuse, défaut que j’estime être le plus détestable en ce monde.
Dommage car la température de l’air et de l’eau méritaient bien une prolongation.
Que dirait La Fontaine ?
Bien malheureux celui qui se fait prendre à son propre piège !
(Adeline)
Sur la plage, un couple me demande de garder leurs affaires, le temps qu’ils aillent se baigner…
Je commence à les dévisager et décide de les ignorer. J’attends docilement. Ils peuvent encore me torturer avec leur question. Un air hésitant commence à se dessiner sur leurs visages.
Je finis par articuler un simple : « non ».
L’envie de renchérir me taquine ; je préfère toutefois jouir de ce moment. Assister à la décomposition de leur sourire me nourrit d’une énergie délicieusement négative. Leur regard s’assombrit, j’ai réussi, ils sont pris de court ! Que faire maintenant ? Partir ? Tenaces, ils semblent vouloir de nouveau céder à la tentation. Je trépigne. Un silence gênant prend place entre nous. Le plus téméraire cède et réitère leur requête. Je m’esclaffe. Un rire ignoble et cruel s’empare de moi. J’entends leurs pas précipités s’enfoncer dans le sable.
Un sentiment de légèreté vient calmer mon joyeux grondement.
Self-control (Lise)
Sud Est de la Sardaigne, début juillet. Le soleil brille, il fait plus de 40°C au soleil, pas un nuage à l’horizon. La journée s’annonce bien. Nous avons vu beaucoup de belles choses ces derniers jours, mais pas encore profité des plages… quitte à le faire, autant voir la plus belle ! Et à ce sujet le Lonely Planet est formel : s’il ne fallait voir qu’une plage en Sardaigne, c’est celle-ci qu’il faudrait choisir !
Alors nous y voilà.
Tiens, le parking de la plage est payant ? Bizarre, ça ne ressemble même pas à un parking…. En plus c’est hors de prix. Tarif unique quelle que soit la durée. Nous n’avions pas prévu de rester toute la journée. Bon, on ne va pas se prendre la tête pour ça… on a fait de la route, dans une heure les enfants auront faim, profitons-en. Nous sommes là pour ça après tout !
Ce parking est interminable, je pensais qu’on était garés tout près de la plage ! Titouan a 18 mois, il ne marche pas encore, j’essaye plutôt d’éviter ce genre de situations pour épargner mon dos… qu’est-ce qu’il fait chaud ! Il est déjà 11h, pas idéal pour se mettre au soleil… Nous irons vite dans l’eau, avec les enfants de toutes façons c’est ce qu’il y a de mieux à faire !
Qu’est-ce que c’est que ce truc ? Ce n’est pas une plage, on se croirait au Hellfest ! La plage est bondée ! Mais bondée… pas comme les plages que nous connaissons ! En face de nous : une forêt de parasols, des gens absolument partout, de la musique à tous les coins de la plage, les serviettes sont collées les unes aux autres… c’est l’enfer !
Respire Lise, si tu craques, tout le monde va s’énerver. On va se trouver une petite place. De toutes façons on n’est pas venus là pour bronzer, on déteste lézarder sur la plage. On posera nos affaires et on ira se baigner. Puis on fera le pique-nique. Les enfants seront contents, ça sera très bien. Regarde le paysage. C’est vrai qu’il y a du monde, mais si on fait abstraction des gens, cet endroit est complètement dingue !
Nous trouvons finalement un petit espace pour nous, pas trop collés aux autres et si on se penche un peu à droite on voit même l’eau ! Nickel ! Allez, on s’installe, on se change et on y va !
Mais qu’est-ce qu’ils font eux ? Ils ne vont pas s’installer là quand même ? Il n’y a pas la place, ça se voit. S’ils se mettent là, on ne pourra plus passer. Allo, c’est un passage ici ! Ok, ils s’installent… leur serviette touche la nôtre, c’est charmant. Respire Lise, continue de gonfler les brassards, on va aller dans l’eau, ça va nous détendre. Il fait chaud, tout le monde en a marre, dans l’eau ça ira mieux.
Il m’interpelle. Je ne parle pas italien, je ne comprends pas ce qu’il me dit. Mais sa femme et lui nous font des signes… qui pourraient se traduire en : « il fait tellement chaud, on va se baigner, vous pouvez nous garder nos affaires ? Merci ! » Ils ont leurs 4 pouces en l’air, de grands sourires, répètent « Grazie mille ! » et s’éloignent vers l’eau… contents !
Non mais ils se prennent pour qui ? Ils sont sérieux ? Ils ont remarqué qu’on était avec deux petits garçons en maillot, lycras, brassards, crémés, avec des bobs et des lunettes sur la tête ? Ils pensent qu’on fait ça pour la déco et qu’on se pose sur cette plage immonde juste pour le plaisir de garder leurs affaires pendant qu’ils font trempette ? La moutarde me monte au nez, j’ai envie de les insulter !
Les deux garçons piaillent, ils ont chaud, ils ont envie de se baigner…
Je la regarde… elle ne me dit rien, mais a son regard noir des mauvais jours. C’est pas le moment de flancher. Souffle Lise, mais vite, sinon la journée paradisiaque va tourner au vinaigre ! Les deux petites paires de lunettes nous regardent sous leurs bobs…
« Vous voyez les deux grands qui ont posé leur serviette ? Et bien je ne parle pas italien, mais je crois avoir compris qu’ils nous proposaient de faire la course ! Le premier arrivé dans l’eau ouvrira le paquet de chips ! »
Et c’est parti pour une course folle à travers les parasols. Les enfants rient, je respire, la colère a disparu. Arrivés dans l’eau, nous croisons nos « délicieux voisins » à qui je dis en français « Nous avons tellement chaud, nous sommes venus ici pour nous baigner » et nous concluons tous les quatre pouces en l’air, sourires accrochés aux oreilles !
Je ne me souviens pas qui a ouvert le paquet de chips, mais nous avons beaucoup ri et passé une bonne journée. Après cet épisode, nous sommes plutôt restés à l’écart des plages paradisiaque Sardes… l’Ile regorge de nombreux autres trésors.