À l’occasion du cinquantenaire de Mai 68, j’ai proposé un exercice en atelier, inspiré d’un texte d’Annie Ernaux, tiré des Années (oui, encore celui-ci !). Chaque participant peut livrer ses propres souvenirs de ce fameux mois qui a bousculé la société française.
Photo : Michel Baron
Mémoire collective et souvenirs personnels
Les photographies des événements ont ancré dans notre mémoire collective des rassemblements gigantesques, des rues parisiennes aux allures apocalyptiques, des slogans entêtants placardés partout.
Mais ceux qui n’étaient pas sur les barricades, quels souvenirs ont-ils gardés de cette période effervescente ?
Découvrez leurs témoignages sur le blog !
NB : Merci à Michel Baron, professeur de musique exilé au Québec, de m’avoir autorisée à utiliser ses photos. Lui-même était étudiant à Paris à l’époque et attendait de savoir s’il pourrait passer son concours ! Consultez son site ici
Voici l’extrait proposé et le court intitulé de l’exercice :
Annie Ernaux, Les Années
Plus tard les journalistes et les historiens aimeraient se souvenir à l’envi d’une phrase de Pierre Viansson-Ponté dans Le Monde quelques mois avant Mai 68, La France s’ennuie ! Il serait facile de retrouver des images ternes de soi, pleines d’une morosité indatable, des dimanches devant Anne-Marie Peysson, et l’on serait sûr qu’il en avait été de même pour tous les gens, un monde figé dans une grisaille uniforme. Et la télévision, en diffusant une iconographie immuable avec un corpus réduit d’acteurs, instituerait une version ne varietur des événements, imposant l’impression que, cette année-là, on avait tous entre dix-huit et vingt-cinq ans et on lançait des pavés aux CRS un mouchoir sur la bouche. Sous la répétition des images prises par les caméras, on refoulerait celles de sa propre histoire de mai, ni notoires — la place de la Gare déserte un dimanche, sans voyageurs et sans journaux à kiosque — ni glorieuses — quand on a eu peur de manquer d’argent (qu’on s’est dépêché de retirer à la banque), d’essence et surtout de nourriture, remplissant à ras bord un chariot à Carrefour, par mémoire transmise de la faim.
À VOUS !
Quel a été votre propre histoire de Mai 68 : de quoi vous souvenez-vous ? Que s’est-il passé dans votre famille, dans votre entourage ? Après les événements, avez-vous noté des changements dans la société ? Racontez !
Superbe travail!
Je relève une anomalie dans le texte d’Annie Ernaux « en 1968, les chariots plein à raz bord chez carrefour, n’existaient pas. »
Merci Franck!
Apparemment la société Carrefour a été créée en 1959, et a ouvert son premier supermarché en 1961 à… Annecy, où a vécu l’auteur!
Mais je crois que les magasins ne portaient pas encore l’enseigne Carrefour…
J’ai adoré les textes de Franck et d’Isabelle mais celui de Franck a attiré toute mon attention…
En effet, j’ai cru entendre mon époux dans le discours de Franck car, étant tous les deux de la même « classe », ils ont vécu exactement les mêmes choses au même moment ! Gilles m’a promis qu’il allait aussi raconter son « mai 68 » même si cela risque de faire un « copier-coller » avec le texte de Franck. On verra bien !
Marie-Louise