Vous n’entendez pas des voix, vous ?!
Bien sûr que si ! Il y a celle, bienveillante, qui nous encourage dans l’adversité. L’autre, impitoyable, qui nous reproche nos petits travers… Pour ce nouveau défi, voyageons dans les fors intérieurs de Lise, Saïda, Catherine et Annie !
Photo: tpsdave
Palabres au premier kilomètre (Lise)
Depuis une dizaine d’années, je cours régulièrement et avec plaisir. Sur ma pause déjeuner au bord de l’Océan ou le week-end sur les berges du canal, je cours entre 7 et 10 kilomètres et j’aime ça. J’apprécie mes itinéraires qui varient selon les saisons, je connais mon rythme, j’ai confiance en moi et je sais à quel point je me sentirai bien à l’issue de ma sortie.
Et pourtant… immanquablement… dès que ma montre vibre pour m’indiquer la fin du premier kilomètre…
– Bon j’ai dit que je faisais une boucle de 10 km, mais 5 ça serait déjà pas mal.
– Mais non, t’as dit 10, 5 ça rime à quoi ?
– Je me sens fatiguée là, limite pas bien…
– Arrête…
– …mais si limite pas bien, j’aurais peut-être dû manger un truc avant de partir…
– Mais tu vas pas recommencer ! A chaque fois !!! [Je regarde ma montre] Ah bah oui, 1 km, ok, normal.
– Mais j’ai faim !
– Allez Lise : respire… pense à autre chose. Tu aimes courir, tu aimes courir, tu aimes courir…
– Non mais ça va, j’ai rien à prouver à personne, si je veux je m’arrête à 2 km, et personne n’a rien à me dire !
– T’as quand même pas pris le temps de te mettre en tenue, laissé tout le monde pour finalement revenir au bout de 15 minutes sans avoir transpiré !
– Je sais pas, en même temps, j’aurais pu me poser et profiter des autres pour une fois.
– Non, tu avais envie d’être seule… ça te fait du bien ce petit moment seule, autant que ça dure le plus longtemps possible.
– … Mais pourquoi je m’inflige ça…
– Allez, pense aux 5 kilos qui trainent depuis la naissance de Malo, tes 35 ans tout ça tout ça… ça va te faire du bien.
– Mais c’était quoi son problème à cette remplaçante qui m’as prescrit un ECG sous prétexte que j’ai 35 ans d’ailleurs ? Elle se prend pour qui ?
– Mais on s’en fout… de toute façon, tu n’es pas prête de le faire son ECG, on en reparle pour tes 36.
– Et si je faisais une crise cardiaque à cause de la course à pieds ? si ça se trouve j’aurais dû le faire rapidement cet examen ! si ça se trouve je devrais vraiment pas courir !
[Ma montre vibre et m’indique 2 kilomètres, mon rythme cardiaque est normal… tout va bien, je profite du paysage…]
– Peut-être que je devrais courir sans montre ?
– Tais-toi et cours.
Dialogue entre mes anges et moi (Saïda)
Ma mère nous disait souvent que nous naissons tous avec deux anges : Un ange noir et un ange blanc. Ils ont chacun un carnet et notent toutes nos actions, l’un tout ce qu’on a fait de mal, et l’autre tout ce qu’on a fait de bien.
Cette nuit-là, impossible de trouver le sommeil. J’ai très peur. Je suis terrorisée par l’idée d’aller en enfer si je meurs dans la nuit. Mes deux anges sont présents, chacun sur une épaule.
Je n’arrive pas à équilibrer car un ange pèse plus lourd ce soir, et pas le bon :
– ce que tu as fait aujourd’hui est impardonnable
– j’ai pourtant fait plein de choses bien dans la journée
– tu as laissé accuser ton frère à ta place
– mais j’avais peur de mes parents
– et c’est mieux de laisser accuser ton frère à ta place ?
– lui, il l’a déjà fait
– cela est son problème
– qu’est ce je dois faire aujourd’hui pour ne pas aller en enfer si je meurs ce soir ?
– prie pour ne pas mourir, et demande à tes anges de t’aider à trouver le chemin
– s’il te plait, ne me laisse pas mourir ce soir.
Silence de mes deux anges…
Je suis toute seule ce soir avec ma peur… je n’ai que sept ans…
C’est peut-être le moment de faire attention à toutes les peurs que l’on porte déjà en nous. Quand un éternuement rime avec un coup de poing dans la gueule, quand on voit son voisin comme son pire ennemi, on peut penser que le vrai virus est déjà là depuis longtemps dans nos têtes bien lavées par la peur. Alors si j’ai quelque chose à vous dire, protégez-vous de tous les virus, avec ou sans visages.
Dialogue intérieur (Catherine L)
Je suis parfaite, j’en ai plein la tête
J’aime faire la fête, manger des cacahuètes
Faire de la bicyclette
Comme je vous le dis je suis parfaite
Je suis coquette, je sens la violette
J’adore la tartiflette
Qu’importe je ne vous donnerai pas ma recette.
J’aurais dû (Annie)
Quand on vit au quotidien avec quelqu’un, on remarque facilement les petites choses qui nous agacent, mais ceux qui vivent avec nous, quelles remarques gardent-ils sous silence pour ne pas nous heurter ?
En ce qui me concerne, je pense que je dois agacer certains avec ma formule préférée : « on aurait dû », lorsque les choses ne se mettent pas comme je veux.
Je vous donne un exemple, lorsque j’ai un rendez-vous prévu de longue date, juste avant de partir je trouve une multitude de choses à faire à la dernière minute, je me laisse peu de temps pour le trajet pour me rendre à ce rendez-vous, ensuite dans la voiture je ne cesse de me répéter :
– Comment t’as fait, tu t’es levée très tôt et te voilà sur la route à regarder ta montre et à craindre de ne pas arriver à temps !
– Doucement ! ce n’est pas grave, tu vas y arriver, il n’y a pas trop de monde sur la route.
– Quelle idée d’avoir voulu absolument étendre le linge, préparer le repas de midi, payer la facture du garage, avant mon départ, j’aurais dû partir plus tôt… Je vais être en retard !
– Ce n’est pas grave, au pire la personne qui m’attend sera comme moi en retard et ça ne paraitra pas.
– Oh là là !! J’aurais dû partir plus tôt ! En plus, à l’heure qu’il est, il n’y a plus de place pour se garer !
– Mais ça va aller ! Je suis arrivée avant l’heure, j’aurais pu partir plus tard !!!
Bonjour à tous, j’ai vu la neige tomber dans mon jardin ce matin. Il faut une sacrée volonté pour courir Lise, et merci pour ce moment de partage avec toi-même,
Oh Catherine, avec ton petit poème léger, et moi aussi j’aime la tartiflette,
Annie, tu es sur tous les fronts, en plus tu arrives à l’heure à ton rendez-vous, bravo.
je prends beaucoup de plaisir à vous lire…