Écrire son histoire, c’est aussi rendre hommage aux belles âmes qui nous ont permis de dépasser nos limites, d’oublier nos chagrins, d’avancer plus léger.e.
Marie partage avec nous un épisode charnière de son enfance, qu’elle rapporte dans son livre autobiographique. Ou comment un maître d’école lui a redonné le goût d’apprendre…
Photo : Daniel Truta
Avec lui, je pouvais enfin aller à l’école sans appréhension
» Il faut maintenant que je vous dise que ma vie d’élève va totalement changer lors de la rentrée scolaire au CM1.
J’ai presque 10 ans et je découvre mon nouvel instituteur, Monsieur Simon.
Il va beaucoup m’aider à prendre confiance en moi, sans me juger, sans me gronder face à mes difficultés.
J’ai très vite senti que je pouvais me surpasser malgré les montagnes à gravir. Je pouvais enfin aller à l’école sans appréhension.
J’allais redoubler d’efforts, surtout pour lui faire plaisir.
Dans ce merveilleux endroit, ma classe…
Cela se traduisit par un besoin vital d’aller chaque jour en classe.
À tel point que je redoutais l’arrivée des vacances scolaires !
Dans ce merveilleux endroit, ma classe, je me sentais si bien.
J’avais le sentiment d’être écoutée ; en somme, mon travail était reconnu.
J’ai déployé tous mes efforts pour accéder à la classe supérieure.
Mais une fois en CM2, mon niveau a beaucoup baissé dès le premier trimestre. Et je me suis retrouvée dernière de la classe, ex aequo avec Valérie L., à son plus grand désespoir…
Au fond de moi je voulais rester avec M. Simon et j’ai redoublé
En ce qui me concerne, la honte passée, cela ne m’affecta pas vraiment.
Car au fond de moi je voulais rester auprès de M. Simon, je l’adorais et sa présence m’était indispensable.
Je l’aimais très fort et il m’était impossible d’envisager une rentrée en 6e comme mes camarades. J’ai redoublé mon CM2 auprès de cet enseignant avec qui j’ai donc cheminé pendant trois ans.
M. Simon était un enseignant remarquable
Il avait créé une bonne ambiance dans sa classe.
Très patient, il ne s’énervait que rarement et il était juste.
Consciencieux, ses cours étaient intéressants voire même ludiques quand il expliquait la grammaire ou les mathématiques.
J’ai en mémoire l’image de mon maître s’appliquant toujours à bien calligraphier les lettres au tableau noir ; cela me fascinait, je trouvais cela beau.
Au fil des mois, j’ai surmonté ma timidité et pris confiance en moi
Jamais je ne m’ennuyais car il prenait visiblement du plaisir à enseigner.
Comme lorsque nous avons préparé durant toute l’année un spectacle de marionnettes basé sur les chansons enfantines. J’ai eu pour mission de fabriquer La Mère Michèle qui a perdu son chat… J’en étais fière.
Au fil des mois, j’ai pu surmonter ma timidité et prendre confiance en moi surtout lors de la présentation de deux exposés.
En effet, j’avais apporté mon chat à l’école et préparé des affiches pour expliquer les différentes parties du corps du félin. Mes camarades avaient beaucoup aimé mon intervention.
Une autre année, j’ai exposé toutes les grandes espèces des baleines dans le monde. Mes dessins à l’appui représentaient des heures de travail mais aussi du plaisir car j’adorais recopier à l’identique. À cette époque la photocopieuse n’existait pas.
Régulièrement, nous faisions du sport
M. Simon avait été un bon basketteur et il avait besoin de bouger, comme nous, d’ailleurs. Fréquemment, il nous faisait rire avec des petits jeux de mots ou des devinettes.
Enfin, j’ai beaucoup aimé les pique-niques de fin d’année où je pouvais voir mon instituteur sous un autre jour et bien sûr, je faisais tout pour être utile et être au plus près de lui.
L’année du redoublement, je fus première de ma classe !
À la surprise générale, je terminai première de la classe, l’année de mon redoublement !
Alors que M. Simon recevait ma mère en entretien en fin d’année scolaire, il lui déclara :
» Je n’ai rien compris avec votre fille ; c’est le redoublement le plus incroyable qu’il m’a été donné de voir : passer de la dernière à la première place, il faut le faire ! «
Ce que personne ne pouvait imaginer, c’est que j’en étais tombée amoureuse du haut de mes 10 ans. L’amour engendre des miracles, c’est connu !
Je connaissais tout de mon maître
Lorsqu’il est arrivé dans mon école, il avait 27 ans, il débarquait de sa Bretagne natale. J’avais remarqué que ce beau jeune homme aux cheveux bruns ondulés avait une allure sportive mais aussi une anomalie : son annulaire droit était toujours replié, probablement une ancienne blessure ?
Durant ces trois années passées en sa compagnie sa vie privée a évolué.
Je me souviens très bien du samedi matin où il nous a annoncé, tout fier, qu’il allait nous présenter sa fiancée : quel choc !
Pire encore, l’annonce de son mariage et le fait qu’il devienne père ont mis fin à mes rêves.
Mais j’avais retrouvé le goût de l’école… «
L’école est un sujet très largement abordé dans l’autobiographie… et dont j’adore entendre les récits !
Vous vous souvenez, dans cet autre témoignage, Claude nous racontait aussi à quel point une directrice d’école lui avait ouvert de nouveaux horizons.
Si vous voulez lire cet extrait, il se trouve ici : Je dois beaucoup à Madame D. qui m’avait prise en affection et qui ne m’a pas lâché la main pendant des années.
Un enseignant vous a marqué.e, vous aussi ?
Ah l’Amour !!! Tu étais vraiment amoureuse de cet instit. on dirait !
Aurait-il été ton « modèle » ? Prendre les élèves comme ils sont, là où ils en sont des apprentissages, ne pas les juger ni leur famille….
Chacun fait ce qu’il peut avec les moyens qu’il a ; tu as bien connu ça (venir d’un milieu dit « défavorisé » culturellement et avoir des aspirations plus élevées) et tu as su l’appliquer dans ta vie professionnelle et quotidienne.
Françoise S